Le modèle économique linéaire – produire, consommer, jeter – montre aujourd’hui ses limites. Face à la raréfaction des ressources et à la pression environnementale, il devient urgent de repenser notre rapport à la matière. C’est dans ce contexte que s’inscrit l’ESRS E5 économie circulaire, une norme du cadre CSRD qui impose aux entreprises de structurer leur usage des ressources naturelles et de limiter leur production de déchets.
Pour les TPE et PME, cette norme peut sembler ambitieuse. Pourtant, elle représente une réelle opportunité de performance, de différenciation et de résilience, à condition de l’aborder avec méthode.
Comprendre la norme ESRS E5 dans le cadre de la CSRD
L’ESRS E5 a pour objectif de mesurer l’impact d’une entreprise sur les ressources naturelles, et de favoriser l’adoption de pratiques circulaires. Elle ne se limite pas au recyclage, mais encourage un changement de paradigme : réduire, réemployer, réinventer.
Concrètement, les entreprises doivent :
- Identifier les matières premières utilisées (origine, criticité, usage)
- Évaluer leur taux de recyclabilité ou de réutilisation
- Décrire les démarches de réduction des déchets
- Documenter les pratiques de circularité : réparation, mutualisation, écoconception…
Cette norme implique aussi de suivre des indicateurs et de démontrer des progrès sur la durée.
Une norme liée aux autres enjeux environnementaux
L’ESRS E5 économie circulaire est étroitement liée aux autres normes de la CSRD :
- ESRS E1 (climat) : moins de matière = moins d’émissions
- ESRS E3 (eau) : moins de consommation = moins de pression hydrique
- ESRS E4 (biodiversité) : moins d’extraction = plus de préservation
Adopter une démarche circulaire permet donc de progresser sur plusieurs volets RSE en même temps. Cela renforce la cohérence de l’action environnementale de l’entreprise.
Pourquoi cette norme est stratégique pour les PME
Les TPE et PME ont souvent une gestion pragmatique des ressources : elles cherchent à limiter les pertes, à réutiliser ce qu’elles peuvent, à éviter le gaspillage. Autant de pratiques qui relèvent déjà de l’économie circulaire… mais qui ne sont pas toujours formalisées.
L’ESRS E5 permet à ces entreprises de :
- Donner de la visibilité à leurs efforts
- Réduire leurs coûts de production ou de traitement des déchets
- Structurer une stratégie d’achats responsables
- Anticiper les futures réglementations (emballages, filières REP, écoconception)
- Répondre à des clients ou partenaires qui exigent des engagements concrets
Même sans expertise technique poussée, une entreprise peut initier une démarche alignée avec les principes de l’économie circulaire.
Intégrer l’économie circulaire dans la stratégie RSE : leviers concrets
Voici quelques leviers simples et efficaces pour intégrer l’ESRS E5 économie circulaire dans votre organisation :
1. Réduire à la source
Moins de matière utilisée, c’est moins de coût, moins d’impact, et moins de déchet à traiter.
2. Allonger la durée de vie des produits
Concevoir des produits plus robustes, réparables, évolutifs ou modulables permet d’éviter leur mise au rebut prématurée.
3. Réemployer et valoriser les matières
Réutiliser des chutes, recycler les matières secondaires, valoriser les coproduits : autant de gestes circulaires facilement accessibles.
4. Travailler avec des partenaires engagés
Choisir des fournisseurs qui intègrent l’économie circulaire ou mutualiser les flux avec des entreprises voisines (emballages, palettes, déchets) renforce la performance collective.
5. Réinventer son modèle économique
Passer d’un modèle de vente à un modèle d’usage (location, abonnement, dépôt-vente…) ouvre de nouvelles perspectives commerciales.
Comment structurer son reporting selon l’ESRS E5
La norme impose une traçabilité accrue des flux de matière. Voici les principales étapes pour formaliser votre démarche :
Étape 1 : Cartographier les ressources utilisées
Quelles matières premières consommez-vous ? D’où viennent-elles ? Sont-elles renouvelables ou non ? Critiques ou abondantes ?
Étape 2 : Identifier les déchets générés
Quels types de déchets produisez-vous ? À quelles étapes ? En quelles quantités ? Que deviennent-ils ?
Étape 3 : Mettre en place des actions correctrices
Réduction, tri, valorisation, substitution, nouveaux procédés… toutes les actions doivent être documentées.
Étape 4 : Suivre des indicateurs
Quelques exemples :
- Taux de réutilisation des matières
- Ratio déchets/produit fini
- % d’achats responsables
- Évolution des coûts liés aux déchets
Étape 5 : Intégrer ces données à votre stratégie RSE
Reliez vos efforts à vos engagements globaux : sobriété, durabilité, responsabilité territoriale.
Conclusion : repenser la matière, renforcer la stratégie
L’ESRS E5 économie circulaire fait entrer la gestion des ressources dans le champ stratégique des entreprises. Ce n’est plus une question technique ou environnementale isolée, mais un levier structurant de performance globale. Produire moins, mieux, plus longtemps : telle est la logique circulaire que cette norme encourage.
Pour les PME, cette approche représente une double opportunité. D’un côté, elle permet de mieux piloter les achats, de réduire les coûts, de sécuriser les approvisionnements. De l’autre, elle offre un nouveau récit à valoriser auprès des clients, des partenaires, des institutions : celui d’une entreprise engagée, sobre, et tournée vers l’avenir.
L’économie circulaire n’est pas réservée aux grands groupes ou aux industries lourdes. Elle commence souvent à petite échelle, par des gestes simples mais répétés, structurés, intégrés dans une vision de long terme. Grâce à l’ESRS E5, ces efforts peuvent désormais être reconnus, mesurés, consolidés et partagés.
Adopter cette norme, même sans obligation légale, c’est anticiper les mutations du marché, renforcer sa résilience, et participer activement à la transition vers une économie plus juste, plus sobre, plus durable.
Nous avons synthétisé les exigences de cette norme dans une fiche claire, pédagogique et directement exploitable pour les TPE/PME. Elle vous permettra de faire le point, de poser vos premiers indicateurs et d’initier une stratégie circulaire concrète.
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